Alerte Conformité #8 : Pratiques commerciales trompeuses : les distributeurs d’assurance sont-ils concernés ?



Le courtier en assurance affinitaire Indexia, et son dirigeant, ont été convoqués devant le Tribunal correctionnel de Paris pour pratiques commerciales trompeuses. Ils sont suspectés d’avoir mis en place des pratiques en vue de maintenir actifs un grand nombre de contrats pour une période artificiellement prolongée par rapport aux souhaits des consommateurs.
 
Autrement dit, le courtier aurait continué de maintenir les contrats d’assurances et d’appeler les primes correspondantes malgré la demande de résiliation formulée par les assurés.
 
Les assurés, qu’ils soient consommateurs ou non-professionnels, sont bénéficiaires des dispositions protectrices du Code de la consommation.
 
A ce titre, les distributeurs d’assurance sont dans l’obligation de vérifier leurs pratiques commerciales afin que celles-ci ne tombent pas dans la qualification des pratiques commerciales « trompeuses ».
 
Retour sur cette notion et les enjeux qui y sont relatifs.

• Que recouvre la notion de pratique commerciale trompeuse dans le domaine de l’assurance ?

Les consommateurs sont protégés par le principe général d’interdiction des pratiques commerciales trompeuses et déloyales.
 
La pratique commerciale trompeuse se divise entre les actions trompeuses et les omissions trompeuses :
 
Les pratiques commerciales trompeuses contiennent ou véhiculent des éléments faux qui sont susceptibles d'induire en erreur le consommateur, ou bien des éléments vrais mais présentés de telle façon qu'ils conduisent au même résultat.
Pour être caractérisée comme telle, la pratique commerciale doit être commise dans l’une des circonstances suivantes :  Lorsqu’elle crée une confusion avec un autre bien ou service, ou une marque, nom commercial d’un concurrent ; Lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur. Lorsque la personne pour le compte de laquelle elle est mise en œuvre n'est pas clairement identifiable.   L'omission d'une information peut également induire le consommateur en erreur.  
Il s’agit de la pratique commerciale qui omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë une information substantielle ou lorsqu’elle n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte.
En pratique, peuvent ainsi constituer des pratiques commerciales trompeuses dans le secteur de l’assurance les exemples suivants : Le fait pour le distributeur d’assurance de ne pas se présenter de façon suffisamment claire ou de ne pas indiquer l’assureur porteur du risque au prospect ; Le fait de ne pas annoncer clairement le montant de la prime d’assurance relative à la garantie proposée ; Le fait de ne pas informer de manière claire à son interlocuteur la nature commerciale de l’appel.

Quels acteurs sont concernés ?

Tous les professionnels proposant des biens ou services à des consommateurs ou non-professionnels sont concernés.
 
De cette façon, tous les distributeurs d’assurance sont soumis à ces dispositions et doivent s’assurer que leur processus de distribution du produit d’assurance ne risque pas d’être qualifiée de pratique commerciale trompeuse.
 
Les intermédiaires d’assurance, les Compagnies d’assurance et les mandataires d’intermédiaire d’assurance sont donc tous concernés par ces dispositions.

Quels sont les facteurs de risque favorisant les pratiques commerciales trompeuses ?

Il est constaté que bon nombre de ces pratiques sont caractérisées lors de la souscription d’un contrat d’assurance suite à un démarchage téléphonique. Il s’agit d’un élément favorisant la mise en place, volontaire ou par omission, de pratiques commerciales trompeuses. 
 
Le distributeur d’assurance doit s’assurer de ne pas tomber dans les critères ci-avant exposés afin de ne pas risquer de voir ces pratiques qualifiées de trompeuses à l’égard des assurés.
 
Nous savons que les modalités de recueil du consentement soulèvent de nombreuses difficultés.  A ce titre, nous pouvons rappeler ici qu’en cas de vente par démarchage téléphonique, le consentement au contrat doit être formalisé par écrit et par le consommateur exclusivement pour éviter toute dérive.
 
            La délocalisation de certaines opérations, tel que les plateformes d’appels dans le cadre d’une distribution par démarchage téléphonique, à l’étranger, peut risquer de favoriser l’émergence de pratiques commerciales trompeuses.
 
Les distributeurs d’assurance concernés doivent de s’assurer du respect strict des protocoles par le personnel et de leur formation afin d’éviter toute dérive auprès d’un consommateur, ce qui est rendu plus difficile avec la distance.

Quelles sont les conséquences de telles pratiques ?

Les conséquences de l’irrespect des dispositions légales peuvent emporter des sanctions de la DGCCRF, de l’ACPR et des poursuites pénales.
  Le contrôle de la DGCCRF  
La DGCCRF est l’autorité compétente en matière de contrôle de la protection économique des consommateurs et de manière générale sur tous les champs de la consommation.
 
Elle est en mesure de rechercher et de constater les infractions et manquements aux règles de protection des consommateurs en procédant à des contrôles auprès d’établissement dont les prestations sont à destination des consommateurs.
 
Les sociétés de courtage, les mandataires d’intermédiaires ou encore les assureurs font régulièrement l’objet de contrôle de la part de cette autorité puisque leurs pratiques commerciales sont, de manière récurrente, adressées aux consommateurs ou aux non-professionnels.
  Le contrôle accru de l’ACPR  
En cas de contrôle l’ACPR, celui-ci portera l’ensemble des pratiques du distributeur d’assurance.

De cette façon, le contrôle opéré pourra mettre en lumière les pratiques du distributeur de produits d’assurance et, le cas échéant, les qualifier de trompeuses.
 
En cas de souscription suite à un démarchage téléphonique, la pratique de l’enregistrement de l’intégralité des communications téléphoniques au cours de la conclusion du contrat d’assurance, et leur conservation pendant deux ans, va faciliter ce contrôle et la caractérisation des éventuelles infractions.
 
L’autorité de contrôle ne limitera ainsi pas son enquête interne au seul process de distribution, mais vérifiera l’ensemble de la conformité du distributeur d’assurance.
 
Ainsi, elle pourra par exemple vérifier si les exigences de capacité professionnelle du dirigeant sont respectées, lequel devra pouvoir justifier de l’accomplissement d’un stage professionnel, d’une expérience professionnelle suffisante ou de la possession d’un diplôme suffisant et celle des salariés.
 
S’il s’agit d’un intermédiaire d’assurance et de son personnel, l’obligation de formation et de développement professionnels continus pourra être contrôlée afin de s’assurer que le niveau de performance est maintenu.
 
S’agissant de ce point et pour les courtiers, notons que l’adhésion obligatoire au 1er janvier 2023 aux associations professionnelles agréées permettra la mise en place d’un pré-contrôle des conditions de capacité professionnelle initiale et continue, les conditions d’honorabilité, ou encore l’adéquation des garanties souscrites, qu’il s’agisse de l’assurance responsabilité civile professionnelle ou de la garantie financière.
 
L’ACPR sera en mesure de contrôler l’entreprise sur la méthodologie appliquée pour la souscription des contrats et le recueil du consentement, sur le respect de son obligation d’information précontractuelle, de conseil et d’information, etc.
 
Au-delà des règles spécifiques au droit des assurances, l’autorité de contrôle peut donc vérifier la nature des pratiques commerciales.
 
Rappelons que l’ACPR est investi d’un pouvoir de sanction allant de la mise en garde à la radiation de la liste des personnes agréées. Des sanctions pécuniaires peuvent être prononcées jusqu’à 100 millions d’euros et 10 % du chiffre d’affaires annuel net en matière prudentielle.
 
La commission disciplinaire publie les sanctions rendues, lesquelles sont souvent commentées et emportent une visibilité auprès du public.

 
Des plaintes de certains assurés à l’encontre de l’entreprise ou de son dirigeant, ou une enquête de la DGCCRF, peuvent donner lieu à l’ouverture d’une enquête.
 
Le procureur peut poursuivre l’entreprise défaillante et son gérant aux fins de les voir condamner.
 
Les pratiques commerciales trompeuses sont punies de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 300.000 € à l’encontre du dirigeant personne physique.
 
Si ces pratiques ont donné lieu à la conclusion d’un ou plusieurs contrats d’assurance, la peine d’emprisonnement est portée à 3 ans.
 
S’agissant de l’entreprise, personne morale, elle peut elle aussi être condamnée, l’amende encourue pouvant aller jusqu’à 1.5 million d’euros.
 
Enfin des peines complémentaires peuvent être prononcées, notamment : L’interdiction d’exercer l’activité professionnelle à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise, Publication et affichage de la décision rendue par le Tribunal, etc  
Ces condamnations peuvent emporter d’importantes conséquences en termes d’image et de réputation de l’entreprise et de direction, dans l’éventualité où le dirigeant viendrait à ne plus pouvoir justifier d’un casier judiciaire permettant de remplir la condition d’honorabilité.
 
A noter également que les assurés éventuellement lésés peuvent se constituer partie civile dans le cadre de la procédure pénale et solliciter leur indemnisation pour les préjudices qu’ils estiment avoir subi.
 
Ainsi, les conséquences de pratiques commerciales trompeuses peuvent être lourdes pour les acteurs de l’assurance et ces derniers sont invités à faire preuve d’une vigilance accrue, et nous ne pouvons que conseiller les acteurs du secteur assurantiel à vérifier leurs process internes et éventuellement à suivre les formations en conformité.

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